LES DEPOSITIONS DE BRONZINO ET DE PONTORMO

Il est intéressant de voir la Déposition de l'élève Bronzino, à côté de l'autre Déposition qui faisait courir tout Florence, celle du maître, Pontormo.
Nous allons nous promener dans ces deux oeuvres, de même taille, environ quatre mètres de hauteur, de même sujet, de même époque. Deux visions fondamentalement différentes d'un même thème.

La Déposition de Bronzino est presque une Pietà. Le Christ est posé dans les bras de la Vierge, entouré des personnages qui ont participé à l'aventure.
Une peinture dans laquelle Bronzino montre le goût qui est le sien pour des compositions très rigoureuses; magnifique ligne qui sinue à travers toute l'oeuvre, jusqu'au haut, et une contre-ligne qui donne l'équilibre, la sérénité à cette composition.
Les détails sont d'une grande beauté.
En particulier, une des trois Maries avec cet extraordinaire gorgerin orfévré qui ressemble à un carcan.
La plus belle, Marie-Madeleine, avec une coiffure extravagante et un visage d'une pureté de dessin presque sculpturale, impression due à la froideur des carnations.
La plus étrange des figures est celle de l'Ange de la Passion qui tient dans son calice le sang recueilli de la plaie du Christ; remarquez la brillance des yeux, si propre à Bronzino, ou encore les boucles, qui sont traitées comme une pièce d'orfèvrerie en or.
On sent ce besoin de rendre par les empâtements, la réalité d'une matière de façon très curieuse.
C'est une peinture très présente, terrestre. Les personnages ont existence, volume, poids et espace.

Il est fascinant d'imaginer ce qu'ont dû être les débats entre le jeune Bronzino si près de la matière et ce Pontormo, plus mûr, si loin de la matière mais si près de l'esprit, et de penser à ce défi qu'ils se sont lancés, de créer sur un même thème, deux oeuvres aussi diamétralement autres.

JACOPO CARRUCI, dit PONTORMO.

Empoli 1494- Florence 1556.

Déposition - 99 ko

Cette déposition est à Florence, dans l'église Santa Félicita, dans la chapelle Caponi, où l'oeuvre est entourée des quatre tondi de son élève, Bronzino.

Pontormo est le peintre de l'immatériel. Le corps du Christ ne pèse rien, les personnages qui le soutiennent ne se tiennent que sur un orteil.
Tous les drapés sont crées de façon à augmenter encore cette impression de vision.

Pontormo est un visionnaire, alors que Bronzino est le témoin pragmatique de son temps.
Ce qui est présence des corps chez Bronzino devient une absence, une ombre chez Pontormo.

Nous allons nous promener dans cette oeuvre car plus on la regarde de près, plus on se convainc que Pontormo est un des peintres les plus étranges de son temps, un des plus attachants.
Le visage du Christ est complètement lavé de toute existence, de toute présence.
Le visage de la Vierge se dilue dans l'eau de son voile; le voile et la robe ne font qu'un, on ne sait plus où commence la robe, où s'arrête la chair tellement l'ambiguïté l'a transformée en une cascade qui est celle de sa douleur.
Marie-Madeleine est plus présente, avec un côté inquiétant dans le regard.
Les porteurs du Christ: celui de l'extrême droite, en olive et rouge, celui du bas, le seul qui nous regarde; très curieusement, il a l'oeil braqué sur le spectateur; le dernier, celui qui soutient le bras droit du Christ, a un visage qui rappelle celui du Christ, plus jeune et traité de nouveau avec ce même sens lavé du pinceau.

 


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